par Richard Chartier

Samuel de Champlain, Père de la Nouvelle-France, Francine Légaré, éd. XYZ, 2003, 172 pages.

L'ouvrage de Francine Légaré sur le fondateur de la Nouvelle-France, du Québec et du Canada en fait, est fascinant et regorge de récits extraordinaires sur sa détermination et son courage de vouloir bâtir une colonie française en terre d'Amérique. L'auteure sait manier la plume, le texte se lit comme un roman. Son talent créatif insère ici et là des dialogues qui nous situent dans le temps et campent les personnages dans cette aventure historique à la fois touchante et hors du commun. On y apprend que la tâche pour Champlain ne fut pas facile car la monarchie française n'était pas très enthousiasme à l'idée de dégager des subsides et des hommes pour développer une terre si lointaine et qui, de surcroît, ne semblait pas posséder de grandes richesses à l'exception de la fourrure. Champlain insistait tellement que le gouvernement cédait mais on peut affirmer ici sans se tromper que la force de Champlain et son ardent désir de réaliser son projet a sauvé l'existence des français en Amérique ou dû moins leur présence aussi discrète qu'elle soit devenue aujourd'hui. On l'a échappé belle lorsque le général anglais Kirke arriva à Tadoussac et menaça Champlain et les colons. Encore une fois, Champlain sut résister un certain temps mais il céda finalement. De retour dans son pays, il apprit que l'Angleterre et la France venait de signer un traité de paix bien avant l'intervention de Kirke. Champlain, en furie, et le cœur gros d'avoir laissé aux Anglais le Canada, lui qui y avait mis tant d'années de travail acharné, a tout fait pour arracher à l'ennemi ce qu'il avait bâti pour la France. On finira par l'écouter mais sans l'impliquer…nul n'est prophète en son pays! Le livre nous informe également des relations privilégiés que Champlain entretenait avec les amérindiens, son génie de cartographes et d'ethnologues, son génie scientifique, son sens de l'organisation et surtout son énorme persévérance. Un ouvrage génial sur un homme génial !

Antoine Labelle, L'Apôtre de la colonisation, Pierre Couture, éd. XYZ, Coll. Les grandes figures, 2003, 166 pages.

Au moment même où l'on a assisté au succès du film "L'homme et son péché", inspiré de l'œuvre de Claude-Henri Grignon, l'ouvrage de Pierre Couture arrive à point. Qui ne se souvient pas du célèbre téléroman "Les plus belles histoires des Pays d'en Haut" écrit par ce même Grignon et diffusé à Radio-Canada où l'on a fait connaissance avec l'avare Séraphin mais aussi avec le sympathique curé Labelle. La description romanesque de Grignon sur l'épopée des colons qui ont développés les Laurentides ont marqués plusieurs générations. L'énorme succès du téléroman puis du film donnent à penser que les Québécois ont la passion de l'histoire de leur pays. Cependant, à la lecture de ce livre remarquable de Couture sur le curé Labelle, je ne suis pas convaincu que nous aimons tant que cela nous rappeler que nos ancêtres ont "trimés dur" pour bâtir le Québec d'aujourd'hui. Va pour les romans et pour les récits d'amour, mais lorsqu'il est question de l'histoire vraie, celle qui nous a marquée au plus profond de notre chair, je crois que nous voulons l'oublier. Et pourtant, que d'enseignements, que de richesses pour la mémoire collective que la vie de personnages comme le curé Labelle. On ne peut rester indifférent à notre destin comme peuple lorsqu'on constate à quel point il n'a pas été facile pour ce grand et costaud bonhomme que fut Antoine Labelle à fournir aux Canadiens français un avenir plus radieux que celui tracé par les Anglais.

Labelle est né à Ste-Rose (Laval) en 1833. En 1837, à St-Eustache, le général anglais Colborne mène son armée composée de milliers de soldats à la recherche des Patriotes, ces Canadiens français qui opposent une résistance aux colonisateurs anglais contre l'exploitation et l'assimilation. Pour arriver à leur fin et montrer l'exemple, Colborne donne l'ordre de piller les maisons et d'éliminer les récalcitrants. Il ravage toute la ville et se reprend l'année suivante de la même manière à Napierville. Suite à des exécutions sommaires et des exils forcés, Londres envoie Lord Durham pour faire le ménage. Pas très favorable aux Canadiens français, il prône l'unification du Haut et du Bas Canada avec comme idée sous-jacente que de cette façon il sera possible d'assimiler les Canadiens français et même de les voir disparaître d'ici quelques années. En 1840, l'Union prend force, l'anglais est la seule langue officielle. "L'Union des Anglais contre les Français. Alors, tu comprends, mon Antoine, les Anglais, on ne les aime pas tellement…Souviens-toi de ça : nous, les Canadiens français, nous sommes chez nous ici. Nous n'avons pas d'autre pays que celui-ci. Voilà pourquoi c'est important que les nôtres s'emparent de la terre. Si nous reprenons possession de notre territoire, nous pourrons le faire fructifier. Et alors, les richesses pourront profiter à tout le monde. Pas seulement à la racaille anglaise." (pp.15-16) Le père d'Antoine ne veut pas que son fils oublie l'histoire récente de son peuple. Et cela marquera Antoine pour le reste de sa vie.

D'autant plus que ce cher Antoine fait preuve d'une intelligence remarquable. Le curé de sa paroisse le prendra à sa charge pour qu'il puisse faire des études et devenir prêtre. Antoine aime bien manger, lire, pêcher dans la rivière des Mille-Iles. Déjà tout jeune Antoine apparaît costaud pour ne pas dire lourdaud. Ce qui ne l'empêche pas d'effectuer toutes les activités qui demandent une forme physique. Il entame ses études classiques au petit séminaire de Ste-Thérèse où il s'intéresse à l'histoire et à la philosophie.

Puis, il est ordonné prêtre en 1856. Mgr Bourget le nomme vicaire du Sault-au-Récollet au nord de Montréal. Lorsque Antoine Labelle est en charge de paroisses situées aux frontières américaines, il doit affronté un problème de taille: celui de l'exode des Canadiens français aux États-Unis pour y trouver du travail. Préoccupé, Antoine Labelle est convaincu qu'il faut encourager les gens d'ici à demeurer sur leur terre et à les aider à pouvoir vivre de leur labeur. Aussi, les protestants tentent d'établir des paroisses anglophones et Antoine lutte pour sauvegarder et établir des paroisses catholiques francophones. En 1868, Antoine est nommé curé dans la paroisse de St-Jérôme qui n'est pas encore un diocèse à l'époque.

Bien en selle dans sa paroisse des Laurentides, un vaste territoire où règne les montagnes, Antoine Labelle met en application son rêve de coloniser ces vastes terres encore vierge. L'enseignement de son père porte fruit. Sa conviction que seul la conquête du territoire par les Canadiens français lui assurera sa survie le poussera à persuader son peuple à s'établir dans les Laurentides. Il entame des excursions en forêt, arpente en canot sur la Rivière du Nord tous les recoins de sa paroisse pour mieux en connaître chaque parcelle de terre. Il visite les colons, les encourage et leur apporte support moral et matériel. Son physique imposant ne lui empêche nullement d'effectuer ses déplacements. Un projet de chemin de fer reliant Montréal et St-Jérôme le hante de plus en plus. Le train est perçu par le curé Labelle comme un moyen essentiel pour assurer le développement de sa région. Il réussit à convaincre les dirigeants locaux mais la ville de Montréal et le gouvernement du Québec hésite. Lors d'un grand froid qui affecte les Montréalais, les pauvres surtout, le bois se fait rare pour se réchauffer. Profitant de l'Occasion, le curé Labelle lance un appel aux colons de sa paroisse pour fournir du bois aux gens de la ville. En tête d'un convoi de chevaux et de charettes chargées de bois, Labelle entre à Montréal en héros. C'est l'occasion rêvée de revenir à la charge avec son projet d'un chemin de fer. En 1876, le rêve est devenu réalité.

Il travaille fort pour attirer des industries dans sa paroisse dont l'importante fabrique de papier Jean-Baptiste Rolland. Le curé fonde une Société de colonisation qui a pour but d'amasser des capitaux afin d'appuyer la colonisation des Laurentides. Il effectue pour le gouvernement canadien une mission officielle en Europe pour attirer les immigrants et les capitaux nécessaires à la colonisation.

Dès 1887, Labelle tente de convaincre le Vatican de créer le diocèse de St-Jérôme. En 1888, le Premier ministre du Québec, Mercier, met sur pied le département de l'agriculture et de la Colonisation et nomme le curé Labelle au poste de sous-ministre. Un an plus tard, Mercier obtient du Vatican que Labelle obtienne le titre de protonotaire apostolique ad instar, en fait un évêque sans diocèse. En 1890, Mgr Labelle se rend en Europe pour continuer d'attirer immigrants et capitaux et aussi pour obtenir que St-Jérôme devienne un diocèse. Cette requête lui est refusé. Mgr Labelle se sent lésé car c'est le fondement même de toute son action que l'on sape. Il doit subir une opération urgente pour une hernie abdominale qui s'avère plus grave que l'on croyait. Le curé Labelle décède le 4 janvier 1891. Sa mort provoque de la tristesse chez ses paroissiens mais aussi chez tous les Canadiens français qui le connaissaient bien et qui lui vouaient respect et admiration. Antoine Labelle a droit à un enterrement digne des grands personnages.

Et l'on comprend pourquoi. Vous dévorerez ce livre: une histoire passionnante, un auteur qui possède une superbe plume et un héros de notre peuple, un défenseur acharné de notre identité et de notre culture.

REVUES

Fleurs, plantes, jardins

Je vous ai déjà entretenu à propos de ces superbes revues "Fleurs, plantes. Jardins" et la Collection Terre à Terre qui nous réserve toujours d'agréables surprises. Voilà donc la revue d'avril 2003 de "Fleurs, plantes, jardins" , son spécial printemps" est un vrai régal pour tout bon jardinier. Dans ce numéro, à surveiller: le jardin écologique, le jardin d'eau, les pivoines herbacées et mon article préféré: "Des rosiers pour faire des haies", un enchantement! Aussi, un texte sur les conifères qui m'a beaucoup plu, des photos sensationnelles et de belles qualités.

"101 secrets de jardiniers" doit accompagner tout bon amateur horticole qui désire aménager un jardin et le réussir. On y trouve des trucs infaillibles et plein d'idées originales. Des exemples : articles sur l'aménagement paysager, aménagement de la façade, la cour arrière, les piscines et spas au jardin, jardins de petites dimensions, cascades et bassins d'eau, etc. À se procurer absolument!

Sélection du Reader's Digest, Avril 2003

Le numéro d'avril de Sélection traite de la question des couples. Intéressant article qui nous rejoint sur certains points même si l'on n'aborde pas les couples gais. On peut quand même s'en inspirer…

D'autres intéressants sujets abordés: les maux d'animaux, comment vaincre le désordre, un homme qui vient en aide aux plus démunis, des trappistes qui fabriquent de la bière, comment briser la spirale du stress…

Richard Chartier

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