Dossiers
Yves
Gauthier
Par Yves Gauthier
Politologue
Dramaturge théâtre gay de Québec
Septembre 2003
Le bras de fer qui oppose les tenants et les opposants du droit
au mariage entre personnes homosexuelles arrive à point
nommé dans un tournant historique du monde moderne. L'homosexualité
étant un état de fait, non pas un choix, les personnes
homosexuelles doivent jouir de toutes les protections garanties
par la Chartre canadienne des droits et libertés dont peuvent
se prévaloir l'ensemble des citoyen(ne)s. Mais il semble
que certains individus, groupes ou organismes ne voient pas les
choses du même œil.
Tant mieux s'il y a débat! Nous pouvons ainsi savoir à
quelle enseigne logent ceux et celles qui se prononcent sur la
question. C'est dans des situations de crise que les masques tombent
et que les vrais visages apparaissent.
Trois arguments de base reviennent constamment comme un monotone
mantra dans les propos des opposants du droit au mariage entre
personnes de même sexe: la loi naturelle, la volonté
de Dieu et la stabilité sociale. Malgré les
contorsions littéraires de toutes sortes, force est d'admettre
que le jupon de l'homophobie dépasse invariablement de
la robe des propos tenus. La phrase suivante résume bien
leur façon de dire: " …on pense que parce
que le mariage [étant] une notion universelle basée
sur la loi naturelle, il ne [peut] être sujet d'une législation
qui viendrait le modifier…non pas par mépris des
gais et lesbiennes, mais simplement parce qu'une institution aussi
fondamentale pour la société ne peut être
modifiée, même pour satisfaire les désirs
les plus profonds d'un petit groupe de personnes." (1)Le
vernis de la sémantique ne peut cacher l'incommensurable
mépris affiché (malgré les nombreux démentis
officiels) vis à vis des homosexuel(le)s. D'un seul coup
de plume on dit que les homosexuels n'étant pas issue de
la nature ne sont pas des personnes comme les autres; qu'ils ne
forment qu'une petite minorité quasi insignifiante; et
en sous-entendant que le mariage dépasse la volonté
humaine, ce dernier est donc une institution divine irréformable.
C'est à se demander sur quelle planète ces gens
vivent et où ils vont chercher leurs informations! Évidemment,
ils se gardent bien d'appuyer les prémisses de leurs arguments
par des références scientifiques, historiques ou
anthropologiques vérifiables. Au mieux on se réfère
aux écrits bibliques. Comme si l'univers n'avait pas 15
milliards d'années! Que l'intelligence et l'histoire humaines
n'existaient que depuis quatre mille, deux mille, mille cinq cent
ou même quatre cent ans au lieu des 5 millions d'années
reconnues par les chercheurs!!!
Alors c'est dire comment leurs propos peuvent être filandreux,
fallacieux, déformants, voire même carrément
mensongers.
La loi naturelle
Dans le règne animal la copulation sert
exclusivement à la survie de l'espèce. Dire que
la finalité du mariage est de même nature c'est ramener
l'humain au niveau de l'animalité. Le mariage ou son équivalent
est l'exception dans la nature sauvage. De plus, à ce jour,
les chercheurs on découvert quelque 300 espèces
animales pratiquant couramment l'homosexualité.(2) Posons-nous
la question: est-ce que les homosexuel(le)s viennent d'une autre
planète? Est-ce que les homosexuel(le)s n'ont pas été
engendrés par deux personnes hétérosexuelles
au moyen d'une mécanique naturelle? Ne pouvant attaquer
de front un point de droit fondamental, on fait dévier
la discussion (car de réflexion libre il y a peu de leur
part) sur une fausseté aussi insignifiante que l'immoralité
et l'illégitimité de l'homosexualité. Sans
preuves aucune, les tenants homophobes de la non légalisation
du mariage entre personnes de même sexe, induisent (sciemment?)
les autres en erreur.
Quand on martèle que le mariage est issue d'une loi naturelle
et est "l'union exclusive d'un homme et d'une femme à
l'exclusion d'autres personnes…" comment peut-on faire
office de référence sachant par ailleurs que la
fidélité et la monogamie n'ont rien d'instinctif
et que sur 1154 cultures humaines prises en compte par les anthropologues,
980 d'entre elles sont polygames? (3)
Dans la Grèce et la Rome antiques, le mariage était
réservé aux patriciens, les plébéiens
en étaient exclus. Le mariage servait d'abord à
élargir le patrimoine familial. La femme était traitée
comme du bétail qu'on échangeait pour des biens.
À telle enseigne que le dicton suivant avait cours à
l'époque: la femme pour les biens familiaux, les garçons
pour l'amour… et les Arabes d'aujourd'hui d'ajouter le melon
pour le goût (la joie).
Selon l'ethnologue Helen Fisher, c'est entre le IVème et
1er millénaire avant J.C. que les Sumériens et Assyriens
mettent en place les premières formes codifiées
d'union. Vers 445 avant J.C. Canuléius, malgré les
Cassandres prédisant les pires ignominies, fait voter une
loi pour que toutes les classes sociales aient droit au mariage,
même entre elles. Et c'est l'empereur Auguste, qui, environ
30 ans avant J.C., a édicté des lois pour rendre
le mariage obligatoire. À chaque fois que les dirigeants
politiques ou religieux doivent imposer une loi ou émettre
un commandement pour régir le comportement humain c'est
que la nature ne fait pas les choses telles que l'Homme social
le souhaiterait.
Le mariage et la monogamie étaient si peu naturels que
ce n'est qu'en 1184, que le pape Lucien 111 consacre le mariage
comme sacrement et exhorte à la monogamie. (4) L'Église
prend alors le contrôle du mariage et c'est avec la révolution
française de 1789 qu'il sera sécularisé de
nouveau étant défini comme un contrat civil entre
deux personnes autonomes. Mais il reste difficile de donner une
jour "J" pour le mariage.(5) De plus, l'union entre
un homme et une femme était tellement loin d'être
une condition sine qua non au mariage, que l'Église catholique
jusqu'au XIVème siècle, avait des rites liturgiques
pour le mariage entre personnes de même sexe.(6)
Lorsque les colons blancs et les missionnaires sont arrivés
en Amérique du nord ils ont découvert plus qu'un
nouveau continent. À leur grand étonnement les Amérindiens
avaient une saine acceptation inconditionnelle des homosexuel(le)s
appelé(e)s Berdaches. Ces derniers étaient même
considérés comme des demi-dieux pouvant servir d'intermédiaires
entre les Esprits et les membres de la tribu. De plus les Berdaches
pouvaient partager le "tepee" du plus valeureux guerrier,
(comme mari et femme) sans que ça pose problème.
Les Amérindiens n'étaient-ils pas plus près
de la nature que n'importe quel Européen venu les convertir?
Inutile de mentionner que les premiers à être excisés
du nouveau monde, sous prétexte de folie, furent ces mêmes
Berdaches. Et c'est justement cet aspect naturel de leur culture
qui a causé leur quasi élimination du continent.
(7) La société amérindienne considérait
la sexualité ainsi que le plaisir lui étant rattaché
comme un cadeau des Esprits. La famille avait un sens très
large ce qui faisait que la copulation n'était pas limitée
à une seule femme. De là une société
matriarcale. Alors pour ce qui est de la soi-disant immuabilité
naturelle du concept du mariage, on repassera.
Ce qui était considéré comme naturel hier,
ne l'est plus aujourd'hui. Serait-il possible que pour le meilleur
ou pour le pire, les conceptions évoluent? Que rien ne
soit coulé éternellement dans le ciment des conventions
sociales? Que tout ce qui concerne l'organisation et la gestion
de la société soit le fruit de la volonté
humaine?
Les tenants de la loi naturelle (qu'ils travestissent à
leur manière) ne peuvent admettre que " ..les finalités
de la nature [ne] sont écrasantes que parce que l'on veut
les réduire au silence et que l'on évacue avec elles
tout ce qui nous définit comme êtres humains."
(8)La nature a une infinité de façons de s'exprimer.
C'est l'humain qui au nom de différentes idéologies
essaie de l'encadrer, voire même parfois d'en occulter certaines
facettes fondamentales et "..le différent s'il
n'est pas reconnu est toujours une menace." (9)
La loi divine
Quand l'argumentaire de " la loi naturelle "
ne tient plus on se rabat sur la volonté de Dieu et les
"saintes écritures" pour justifier son
opposition au mariage entre personnes de même sexe et ainsi
camoufler son homophobie sous d'onctueux sophismes. Faut reconnaître
que l'idée de dieu prend sa source dans la soif d'absolu
et au besoin d'éternité en voulant prolonger sa
vie après la mort. Comme le signale Carl G. Jung "
la peur est plus dangereuse que la haine ou la colère"
et que contrairement à la science " le genre religieux
est un vent qui souffle où il veut."(10) Il n'est
donc pas étonnant que comme l'a découvert le fameux
psychanalyste D.W. Winnicott que le siège de la religion
soit situé au même endroit dans le cerveau que la
créativité et le rêve, appelé aire
de jeu. (11) Et Jung de poursuivre que Dieu est une image intellectuelle
dont le centre est partout et la circonférence nulle part.
L'humain se créant de toutes pièces un Dieu parfait,
seuls ses manants terrestres peuvent être fautifs. L'Homme
a besoin d'être rassuré, de ne pas laisser prise
à l'angoisse de l'inconnu, alors " toutes les fois
qu'il rencontre une chose très mystérieuse, il projette
ses conceptions subjectivisées, sans la moindre auto-critique."
(12) Ce n'est pas tout le monde qui est capable de se comporter
en adulte et de "reconnaître sans trop souffrir,
que le «Père Noël» n'existe pas [Et] d'apprendre
à vivre dans le doute et l'incertitude." (13)
Il n'est pas de discussion rationnelle possible avec les théistes
car quand on croit posséder la vérité, qu'on
se dit directement inspiré de Dieu ou pire quand on se
dit représenter la volonté de Dieu ici bas, on a
de comptes à rendre à personne. Crois ou brûle!
Les Églises ont eu le don d'exploiter les carences affectives,
intellectuelles, psychologiques, économiques des gens,
surtout chez les plus démunis. Elles sont même devenues
maître dans l'art de s'imposer à force de manigances,
de tromperies, de demi-vérités et de demi-mensonges,
refusant l'égalité dans la différence, le
tout basé sur des écrits reflétant des valeurs
culturelles vieilles d'au moins 4000 ans, interprétés
à travers le prisme déformant de la foi. Que les
religions comme les dieux soient une création de l'Homme
est d'une évidence qu'on oublie trop souvent. La croyance
en Dieu a le même effet psychologique que de siffler dans
le noir pour évacuer ses peurs. C'est pourquoi, chez les
pleutres de l'inconnu, les rites et les dogmes religieux sont
sources d'hygiène mentale.
Il est très désolant que même après
l'hypothétique "bug" de l'an 2000, il
en est encore pour croire au créationnisme. Des gens pour
qui Galilée, Spinoza ou Darwin sont des figures du diable.
Ils ne peuvent admettre la connaissance vérifiable. "Reconnaître
que plusieurs sociétés occidentales du passé
- et sans doute la majorité d'entre elles – ont institutionnalisé
une forme quelconque d'union homosexuelle sentimentale, nous offre
une vision beaucoup plus exacte de l'immense variété
des relations sentimentales humaines et des réactions sociales
qu'elles ont suscitées que nous n'en aurions en refusant
de croire, par pruderie, que des choses aussi «innommables»
aient pu exister." (14) Du côté des dirigeants
cléricaux, qui ont une influence directe sur les piétistes
on ne prend pas en considération les faits historiques
de peur de voir détruire leur théorie que le mariage
tel qu'on le connaît aujourd'hui avec la finalité
que les âmes religieuses lui accolent " en tant
qu'union de l'homme et de la femme, existait bien avant les grandes
religions actuelles et qu'il est ainsi depuis les débuts
de l'humanité parce qu'il s'appuie sur la loi naturelle."
(15) Dans une seule et même phrase on retrouve toute la
panoplie possible et impossible de faussetés véhiculées
par les «représentants de Dieu» sur
terre ayant reçu leurs connaissances de la langue de feu
descendue sur les apôtres après l'ascension de Jésus-Christ
au ciel (avec ou sans son prépuce?) et qui leur donne le
droit de dire n'importe quoi sans appuyer leurs assertions de
références sérieuses. Ils se basent sur une
intuition philosophique provenant de la sagesse séculaire
de l'Église. Ils proposent toutes sortes de projections
apocalyptiques sur le devenir d'une société qui
reconnaîtrait légalement le mariage de personnes
homosexuelles. " …le mariage entre personnes du
même sexe peut être nocif pour l'éducation
des enfants et les rendre confus à leur propre réalité"
(16) Ou encore que " d'ouvrir le mariage aux personnes
de même sexe entraînera une diminution importante
de la valeur du mariage traditionnel comme étant la base
de la famille et une institution essentielle pour l'équilibre
de la société."(17) Et puis quoi encore!?!
Le refus au droit à l'égalité pleine et entière
aux homosexuels, a des relents fin moyenâgeux où
un certain Grégoire IX donnait le ton au genre d'élucubrations
que nous entendons encore aujourd'hui: "…car si
le juste Seigneur punira ceux qu'excusent en quelque manière
l'inconstance et la fragilité de leur nature, qu'elle décision
prendra l'arbitre du salut et de la damnation éternels
touchant les ennemis de la nature, qui faussent l'usage naturel?
Quand ces êtres abominables – méprisables aux
yeux du monde, odieux au conseil des êtres célestes,
sauvages et pire que presque tous les animaux vivants, dépourvus
de raison, fermés à la douceur de la nature, privés
de la lumière intérieure et incapables de distinguer
un sexe de l'autre (sic) – se présenteront au jour
du jugement terrible, le Seigneur n'ordonnera-t-il pas qu'ils
soient tourmentés dans les enfers par des châtiments
inconcevables, pires que ceux réservés à
tous les autres maudits."(18) Et dire que cette bulle
papale était écrite sous l'inspiration de l'Esprit
Saint! Nous en retrouvons des séquelles dans certains propos
que tiennent encore des personnes aussi éclairées
que l'ineffable Fred Henry, Évêque de Calgary lorsqu'il
dit que "Jean Chrétien met en péril son
repos éternel….Je crois que sa place au paradis est
en danger. Il est en train de commettre une grave erreur sur le
plan de la morale et il ne respecte pas la volonté de Dieu."(19)
La sexualité a presque toujours été une source
d'appréhension pour les chrétiens. L'Église
a de tous temps préféré la virginité
à la sexualité active, commençant par les
écrits de Saint-Paul qui dit que " la meilleure
condition pour l'homme autant que pour la femme est de rester
célibataire" en passant par Saint-Jérôme
pour qui " le mariage remplit la terre, la virginité
remplit le paradis" prônant même l'abstinence
sexuelle dans le mariage. Selon ce dernier, le mariage détourne
de la sagesse. Comme l'Église doit malgré elle suivre
l'évolution sociale, (et concernant la sexualité
elle livre une bataille qui ne sera jamais gagnée) le but
avoué de la sacralisation du mariage était de contrôler
la sexualité car pour ses penseurs les pulsions libidineuses
sont instillées par le Malin. Toujours en étant
à la remorque de l'évolution sociale, Pie XII a
finalement reconnu en 1951 comme naturelle la recherche du plaisir
entre deux conjoints dans leurs relations dyadiques. Mais il n'en
demeure pas moins que pour la chrétienté l'esprit
et la chair sont deux ennemies irréconciliables. La sexualité
n'étant tolérée que pour des fins reproductives…
et encore par défaut.
Pour nous parler d'équilibre de la personne humaine on
envoie au front l'Évêque auxiliaire de Québec,
arborant son diplôme en psychologie mais parlant en tant
que théologien. Pour lui " la nature humaine n'est
pas parfaite depuis le péché originel"(sic)
et " l'homme est fait d'un corps, d'une intelligence,
d'une sensibilité, d'une spiritualité. Le défi
c'est de vivre en équilibre à travers toutes ces
dimensions là. Quand un élément est déséquilibré
il faut aider la personne à cheminer, à grandir."
(20) Est-il plus grand déséquilibre que de se couper
volontairement de la sexualité, source de la vie, pour
en prôner l'abstinence? Faut vraiment ne pas avoir résolu
ses complexes d'Oedipe ou d'Électre pour se fabriquer de
toutes pièces des Mères et des Pères parfaits
sous forme de déités. Faut être profondément
troublé pour avoir une morbide fixité sur la répugnance
à une sexualité active.
De plus, on essaie de nous faire croire que l'homosexualité
peut être une pulsion sexuelle acquise. Ou encore qu'on
peut en guérir. Pire, que "l'homosexualité
est une déviance. Elle résulte d'une blessure profonde.
Les gars que j'ai connus avaient tous subis des traumatismes:
agression sexuelle, violence." (21)
Est-ce qu'il y a un psychanalyste (un vrai) dans la salle?!?
La position de l'Église catholique et de ses quelques fidèles
vis à vis le mariage de conjoints de même sexe rappelle
les luttes menées contre l'esclavage et la ségrégation
raciale; celle du droit de vote aux femmes et de toutes autres
formes de libération ou d'affirmation. Pour ces gens, les
noirs on les aime en autant qu'ils soient esclaves et les femmes
sont parfaitement égales tant qu'elles demeurent dans leur
cuisine. Qu'on se rappelle la lutte des obscurantistes contre
le droit à l'adoption des enfants légitimes, contre
la loi sur la protection de la jeunesse, contre la loi sur le
divorce et dernièrement contre celle sur l'union civile.
Sans parler de la lutte contre le droit à la contraception
et de l'avortement. Tous des combats d'arrière garde menés
par les mêmes personnes qui aujourd'hui s'opposent à
la légalisation du mariage pour les personnes homosexuelles.
Mais elles disent néanmoins avoir " ..un grand
respect pour les gais, c'est l'action homosexuelle qui[ les] dérange.."
(22) En d'autres mots, vous avez le doit d'être ce que vous
êtres en autant que vous ne le soyez pas totalement, vivez
en eunuques.
Il ne faut pas minimiser l'influence des Églises sur l'imaginaire
populaire et ce qui est encore plus dangereux, sur celui des législateurs.
Pour G. W. Bush, président de la première puissance
mondiale et qui a été élu, tout comme Carter
et Reagan, ave l'aide des différents groupes religieux
conservateurs: " ...[il] n'oublie pas que nous sommes
pécheurs… Mais cela ne veut pas dire que quelqu'un
comme moi a besoin de parvenir à un compromis sur la question
du mariage." (23) Pour ne pas être en reste notre
premier ministre provincial s'est acheté une audience privée
pour aller dire à la "super star" de Rome, le
plus homophobe des homophobes, que les Journées Mondiales
de la Jeunesse de 2002 ont profondément marqué le
Québec et les Québécois. Y a-t-il quelqu'un
dont la vie a changé un tant soit peu depuis le rassemblement
des jeunes à Toronto? Qu'importe!… Notre frisé
national aura connu, pendant l'espace d'un instant, avec sa petite
famille, un moment d'extase infini….aux coûts de 1,7
M$ pour la société québécoise.(24)
Heureusement que Jean Chrétien est têtu. Mais Paul
Martin….
Le monde doit continuer à se libérer
de la dictature de l'innérance des livres saints. Il serait
temps que les Églises et leurs "suiveux" aveugles
reconnaissent que la sexualité est force centrifuge pour
aller vers l'autre et force centripète pour se connecter
à soi (25) et que " la baise n'est pas une fin
en soi, c'est un moyen de connaître les gens qu'on aime
ou qu'on aimerait aimer, de les honorer et d'avoir un peu moins
peur des autres en prenant soi-même sa part d'amour."
(26)
Il reste un long chemin à parcourir pour les biblistes
réactionnaires car ils appuient leur foi (contraire du
raisonnement) sur des écrits, selon lesquels la première
faute de l'Homme a été de vouloir accéder
à la connaissance et à la liberté. Quel genre
de crédibilité un être affranchi de "l'unidimensionnalité"
manichéenne et réductrice de la pensée religieuse
peut-il accorder à ces porte-parole?
La loi civile
Les ardents défenseurs du statut quo prédisent des
catastrophes sociales jamais vues si le concept du mariage tel
qu'on le connaît était modifié pour inclure
les personnes de même sexe. On verrait la fin de la stabilité
sociale. Les enfants vivants avec des couples de même sexe
seraient perturbés à jamais. Le pays deviendrait
un autre Sodome. La survie de l'espèce serait menacée.
Les foudres de Dieu s'abattraient sur le peuple canadien. Toutes
choses aussi farfelues les unes que les autres et contredites
dans les faits quand on se donne la peine de coller un tant soit
peu à la réalité.
Disons que le mariage est assez récent si on tient compte
que la branche de l'Homo Sapiens s'est détachée
de celle du chimpanzé il y a environ cinq (5) millions
d'années. Le mariage étant oeuvre humaine, sa forme
et sa fonction ont été et peuvent encore être
modifiées selon les conjonctures. En ce qui a trait aux
enfants qui subiraient un traumatisme irréparable en partageant
la vie d'un couple homosexuel, les recherches et études
de Michel Dorais de l'Université Laval et Danielle Julien
de l'UQAM, entre autres, prouvent le contraire.(27) C'est quand
on ne nomme pas les choses qu'elles se dérobent à
toutes analyses et ne peuvent être correctement décrites.
La Hollande et la Belgique qui ont accordé les mêmes
droits au mariage aux homosexuels qu'au reste de la société,
même celui d'adopter des enfants du pays (Hollande) ne semble
pas en souffrir plus que le Canada qui n'a pas encore légalisé
le droit au mariage gay. De plus, dans nos sociétés
occidentales le mariage ne fonde plus les couples, au mieux, il
leur succède. Les statistiques sont très éloquentes
à ce sujet tant pour la vie à deux que la finalité
traditionnelle du mariage. En France, 95% des femmes âgées
de 20-44 ont recours à un moyen contraceptif. Sur 485,000
couples qui se forment chaque année seulement 65,000 se
marient sans avoir expérimenté la vie en commun.
Aujourd'hui, parmi les premières naissances 55% se font
hors mariage comparativement à 6% en 1967. Au Québec
les unions libres et les unions maritales sont tellement jugées
équivalentes que les statistiques les confondent. Mais
quand même, on découvre, selon le recensement de
2001, qu'on compte plus d'un demi-million de couples vivant en
union libre comprenant les couples de même sexe. Parmi les
couples de même sexe on retrouve 12 695 hommes et 8 030
femmes.(28) Les mentalités on changé depuis les
vingt-cinq dernières années à tel point qu'une
enquête de Dumas et Bélanger (1995) a révélé
qu'environ les deux tiers (64%) des personnes de 25-34 ans vivent
ou ont vécu en union libre. On estime que 60% des personnes
de 35-39 et 45% des personnes de 40-44 ans ont connu l'union libre.
Ce comportement est donc devenu le plus courant parmi les générations
nées depuis le milieu des années 1950.(29) Environ
le tiers des hommes et des femmes de 15 ans et plus vivent en
union libre, toujours selon le recensement de 2001.
C'est donc dire que le mariage n'est plus le l'endroit obligé
pour la légitimation des relations sexuelles, pour que
la femme passe de fille à épouse à mère
et le garçon de fils à époux à père.
Il est évident que le mariage ne joue plus le rôle
qu'on lui avait attribué lors de sa conception originale.
La libre pensée s'est débarrassée de l'esclavage
du dogme et les gens s'approprient leur vie en la voulant la plus
heureuse possible sans désir immanent à la souffrance.
La vie doit être festive et apporter le plus de joie terrestres
possible.
Toutes sortes d'unions ont remplacé le mariage dans une
quantité de pays dits avancés. Outre la Hollande
et la Belgique citées plus haut, le Danemark, la Norvège,
la Suède, les Pays-Bas, la France, l'Espagne, le Portugal,
l'Allemagne ont adopté des législations permettant
à des couples de vivre en dehors des liens du mariage en
toute légalité. Le processus de légalisation
et de légitimation des couples hors mariage sera de plus
en plus accentué avec une nette ouverture pour les couples
de même sexe puisque " la cour européenne des
droits de l'Homme de Strasbourg a même tranché en
juillet 2002 en faveur des mariages transsexuels dans deux arrêts
rendus au motif que chacun a «droit de se marie et de fonder
une famille»"(30)
En ce qui a trait au danger de déstabiliser la société
par l'accession des homosexuel(le)s au mariage, n'est rien de
moins qu'une vue de l'esprit complètement loufoque.
L'ensemble de la population québécoise voit si peu
probable ce danger d'éclatement de la société
en regard au mariage gay que lors d'un sondage effectué
du 12 juin au 6 juillet 2003, 60% des répondants se sont
montrés favorables à l'idée. Même ceux
et celles qui se disent catholiques ne sont pas en reste puisque
56% d'entre eux/elles sont en faveur de la modification de la
définition du mariage. Les plus réticents sont les
personnes de 60 ans et plus qui s'y opposent à hauteur
de 64%. Leur endoctrinement religieux a tellement été
intense que de leur propre aveu ils ne peuvent se débarrasser
complètement des notions qu'on leur a imposées dans
leur jeunesse. Les gens instruits et qui ont un meilleur revenu
sont en très grande majorité en faveur du droit
au mariage homosexuel.(31) Même aux Etats-Unis les choses
commencent à changer puisque 6 juges sur 9 de la cour suprême
sont contre les lois interdisant la sodomie.
La définition du mariage par le ministre Cauchon apparaît
respectueuse du droit à la dignité de chacun en
«étant , sur le plan civil, l'union de deux personnes
à l'exclusivité de toute autre personne».
Mais n'oublions pas néanmoins que l'essence de la discussion
porte sur le DROIT au mariage et non pas sur le mariage
lui-même, nonobstant que ce droit change certaines façons
de percevoir les unions maritales. Pour les passéistes
religieux et les Églises leurs croyances sont aussi protégées
puisqu'ils ne seront pas obliger de célébrer les
mariages qu'ils ne veulent pas célébrer.
Mais parions que, comme pour le reste, à force de raison
libre et éclairée, la cohorte de l'immobilisme joindra
les rangs de la majorité civile.
Conclusion
Le projet de loi sur le mariage des personnes de même sexe
ne promet rien d'autre que d'être un outil civil pour ceux
et celles qui veulent s'en prévaloir. Ça n'enlève
aucun droit à quiconque. Personne n'est obligé de
l'utiliser ou de l'appliquer. Il est faux de claironner sur tous
les toits que les gays veulent du mariage. Ce que les gays veulent
ce sont les mêmes droits que les autres membres de la société
devenant par le fait même reconnus comme égaux et
citoyens à part entière.
Les constitutions et les Chartes des droits et libertés
sont les remparts contre lesquels viennent s'écrabouiller
les attitudes et les actions sexistes, ségrégationnistes,
discriminatoires, racistes enfin tout ce qui permettrait à
une majorité d'abuser de la puissance du nombre au détriment
de la dignité d'une minorité. Dans ce cas-ci il
nous est permis de soupçonner les adversaires du droit
au mariage des personnes de même sexe ont surtout peur que
l'homosexualité soit un jour considérée comme
normale. Les raisons qui ont amenés diverses civilisations
à opter pour le mariage tel que nous le connaissons n'existent
plus. La démographie mondiale n'est pas en danger. Le sexe
et l'amour font de moins en moins peur à la majorité
des gens.
Dans le présent débat, tout le monde a droit de
parole, mais personnes n'a le droit de menacer quiconque de représailles
et d'induire quiconque en erreur. Le droit à l'égalité
pour tous est une lutte à finir. N'oublions pas que chaque
politicien, en général, a la conscience aussi élastique
que le nombre de votes que sa prise de position peut lui attirer.
L'égalité n'exclue pas la différence et la
différence n'exclue pas l'égalité.
" I had a dream..."
Notes 1- Site
Web du diocèse de Québec, août 2003
2- Psys et biologistes s'affrontent sur le sexe, La Presse 26-02-03,
B-4
3- L'animal morale, étude, Robert Wright, p.395
4- Histoire du mariage, Sabine Melchior-Brunet, Catherine Scelles,
Éditions de la Martinière, 2000, p.42
5- Mariage, sexe et tradition, Pascale Wattier, Olivier Picard,
Plon, 2002, p.72
6- Les Unions du même sexe dans l'Empire antique et médiévale
1994 et Christianisme, tolérance sociale et homosexualité
1985
7- The Berdache spirit, Susan Parker, The Berdache tradition,
Berdache origin Myth, Richard L. Dieterle, What are Two-spirits/Berdache?
,Will Roscoe, Two spirit people Nadleeh Berdache in American culture,
DRK. (voir la Toile)
Moeurs et histoire des Indiens d'Amérique du Nord, René
Théverin/Paul Coze, Petite bibliothèque Fayot
8- La rouge différence, F. Morin, Éditions du Seuil,
1982 p. 186
9- Ibid p.30
10- Psychologie et religion, Carl G. Jung, Buchet-Chastel, 1958,
p. 100
11- Jeu et réalité, D.W. Winnicott, Gallimard, 1975
12- Psychologie et religion, op. cité
13- L'espace prend la forme de mon regard, Hubert Reeves, Éditions
du Seuil, 1999, p.66
14- Les Unions de même sexe dans l'Empire antique et médiéval,
Fayard, 1994, p. 298
15- Diocèse de Québec, op. cité
16- Real Women et Focus on the famuly, La Presse 08-07-03
17- Lettre à Jean Chrétien, Marcel Gervais, Archevêque
d'Ottawa, La Presse, 18-07-03
18- Christianisme, tolérance sociale et homosexualité,
Gallimard, 1985, p.370
19- La Presse 01=08-03
20- Le Soleil 10-08-03
21- La Presse, Patrick Allaire, étudiant au Grand Séminaire
de Québec (31 ans) 02-08-03
22- Conférence des Évêques catholiques du
Canada, La Presse 02-08-03
23- La Presse 31-07-03
24- Le gouvernement Charest a décidé de ne pas réclamer
ce montant à l'Église catholique du Québec
suite au fiasco des JMJ
25- Les Météores, Michel Tournier, Gallimard, 1975
26- La rouge différence op cité p. 114
27- Conférence Michel Dorais professeur et chercheur U.L.,
30-09-03 Québec
28- La situation démographique du Québec, bilan
2002, institut de la statistique du Québec p.104
29- Ibid, p. 106
30- Mariage sexe et tradition, op cité p.20
31- National Post, 06-08-03
Yves Gauthier
(Québec)
www.chez.com/anima21
Septembre 2003
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La ville de Québec a un nouvel archevêque.
Par le fait même, le Canada a un nouveau primat de l'Église
catholique. Alléluia!
Ouellet est le 23ème successeur en ligne directe de François
Montmorency de Laval, premier évêque de Nouvelle-France.
Marc Ouellet succède donc à Maurice Couture qui,
lui, succédait à… Tous semblables, répondant
à l'appel.
Je suis en liesse. Alléluia!
"J'me peux pus", d'autant qu'il est l'homme désigné
par Jean-Paul le second. Plus privilégié que ça
tu meurs!
Je me suis permis de jeter un coup d'œil (car n'étant
pas invité) à l'intronisation officielle de Ouellet
en tant qu'archevêque dans l'historique cathédrale
de Québec. J'ai été éberlué.
Le Moyen-Âge est tellement fabuleux!
Fallait voir tous ces pontifes mitrés de rouge et de blanc,
engoncés dans leur quant-à-soi, affublés
de leurs robes empourprées et de leurs bijoux dorés,
fiers de leur illusion sacrée. J'ai été presque
sidéré.
Le Moyen-Âge c'est tellement impressionnant!
Et quelle est la priorité du nouveau monseigneur-prosélyte-missionnaire-
porteur-de-la-vérité? Rien de moins que la reconquête
de la jeunesse en passant par l'endoctrinement des enfants.
Quelle est la plus précieuse valeur qui sera mise de l'avant?
Rien d'autre que la continence et la chasteté telles que
supposément pratiquées par Jésus lors de
son non moins supposé passage sur terre.
D'abord que sait-il vraiment de sa continence et de sa chasteté?
Et deuxièmement en quoi sa névrotique obsession
de la sexualité devrait redevenir la norme pour tous ceux
et celles qui ont réglé leur complexe d'Oedipe ou
d'Électre? Pourquoi vouloir enrégimenter les jeunes,
qui ne sont pas en âge de faire la part ders choses, venant
gonfler les rangs de tous ceux et celles qui se fabriquent des
mères et des pères illusoires pour satisfaire leur
bancale équilibre psychique?
Le mot d'ordre pour Ouellet est: pas de relations sexuelles en
dehors du mariage et encore moins dans une relation homosexuelle.
Voilà qui obligerait des millions d'individus à
faire fi de la plus grande force créatrice (et pas seulement
d'enfants) et rédemptrice présente chez l'être
humain. J'en suis ébaubi.
Le Moyen-Âge est tellement éclairé!
Les religions sont au service des pleutres et certains d'entre
eux (elles) savent très bien s'en servir pour asservir
bon nombre d'adultes-enfants. L'humain, ayant tendance à
l'anthropomorphisme, s'est inventé des dieux à son
image pour se sécuriser devant l'angoisse de l'inconnu.
Malheureusement, avec Nietzsche, on doit admettre que l'idée
de Dieu ne pourra jamais être totalement expurgée
de l'être humain-infantilisé car, comme le souligne
Hubert Reeves : "devenir adulte c'est reconnaître sans
trop souffrir que le Père Noël n'existe pas. C'est
apprendre à vivre dans le doute et l'incertitude."1
À défaut d'assumer notre condition d'humain adulte,
pourrions-nous au moins faire un effort pour ne pas laisser notre
vie être asphyxiée par une bande de peureux qui renient
la vraie vie au nom d'un au-delà fictif? Cessons les exemptions
fiscales pour toutes les églises.
Le Moyen-Âge a assez duré!
Et on dit que le congrès eucharistique de 2008 devrait
se tenir à Québec. Arrêtez! J'me peux vraiment
"pus", j'vais orgasmer!
Yves Gauthier (Québec)
www.chez.com/anima21
Janvier 2003 1Hubert
Reeves, L'espace prend la forme de mon regard, p.66, Éditions
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De polyandrie, de
polygynie et de monogamie
L'humain
est le seul être capable de jeter un regard sur lui-même.
Malgré tout, il appartient au règne
animal, de la classe des mammifères comptant environ 4300
espèces parmi les 30 millions d'autres espèces des
règnes végétal, microbien, etc.
Et toutes ces espèces évoluent constamment
depuis des milliards d'années.
Contrairement à la presque totalité
des autres espèces, l'humain à développé
au fil des ans, comme base de fonctionnement social, la famille
nucléaire, se composant d'un couple et de sa progéniture,
et ce pour diverses raisons d'ordre génétique, économique
et culturel.
L'humain est aussi unique dans sa sexualité
puisque les partenaires sont sexuellement réceptifs l'un
à l'autre en tout temps et que le plaisir prend une place
prépondérante dans l'accouplement.
Pour bien comprendre la sexualité humaine
et son évolution nous devons adopter une approche scientifique
et faire appel à l'anthropologie, l'éthologie, la
paléontologie, la physiologie, l'anatomie, la biologie,
l'histoire, la sociologie et toutes les autres sciences pouvant
apporter un éclairage crédible sur la question.
Nous sommes donc loin de la théologie (qui
malgré son appellation n'est pas une science), de la Genèse
biblique et des tenants de la génération spontanée,
n'en déplaise à tous les Jean-Paul et Raël
de ce monde.
Biologie évolutionniste
et économie
Il semble que toutes les espèces aient
d'inscrit dans leurs gènes, mâle et femelle, la pulsion
reproductrice à tout prix. Le plus grand nombre d'accouplements
possible augmentant les chances de propagation des gênes
dominants pour la sauvegarde, l'amélioration et l'augmentation
numérale de l'espèce. Cette pulsion semble encore
plus présente chez le mâle puisqu'il n'a pas la responsabilité
de la grossesse.
Dans cette optique, pourquoi un mâle n'irait
pas propager ses gênes chez une autre femelle en oestrus
lorsque la première est fécondée?
Les recherches montrent que la polygynie et la
polyandrie étaient coutumes normales dans la plupart des
sociétés humaines traditionnelles (cueilleurs-chasseurs)
avant l'apparition d'institutions d'État (avec la domestication
de certaines plantes et animaux). Pour des raisons d'ordre économique,
les hommes en général n'avaient malgré tout
qu'une femme à la fois.
Les sociétés se développant,
seuls les très riches, donc les plus habiles, les plus
forts, les plus intelligents, etc., pouvaient s'offrir le luxe
d'un harem. C'est ainsi que par exemple on a pu nombrer à
1400 la progéniture de l'empereur du Maroc Ismail le Sanguinaire.
Question de propagation de gènes, ce n'est pas rien!
Traits culturels
Nous pouvons passer outre les explications
de la grosseur des seins et des hanches chez la femme ou du pénis
chez l'homme (quatre fois plus volumineux que celui des gorilles),
cela faisant aussi partie de l'évolution génétique,
et s'attarder au plaisir que la sexualité procure.
Avant de répondre à des diktats
religieux, l'humain doit satisfaire des impératifs économiques
et sociaux. Plus tard, les dogmes religieux viennent renforcir
les ententes sociales et mieux asseoir le pouvoir temporel.
C'est ainsi que l'individu dès sa naissance
vit sous le joug de règles morales et sociales se confondant
l'une dans l'autre pour assurer une certaine cohésion dans
l'évolution de la communauté à laquelle il
appartient. Et chaque société a ses propres valeurs.
Les pulsions génétiques et affectives
peuvent s'exprimer plus ou moins librement à travers les
valeurs culturelles des différentes sociétés.
Depuis des temps immémoriaux, chaque membre
est assujetti à la tyrannie de valeurs socio-religieuses,
renforçant le pouvoir et l'autorité d'une minorité
étant souvent les premiers transgresseurs de ces mêmes
valeurs.
Que le regard soit tourné vers Rome ou
La Mecque, Charlemagne et Mahomet ne sont pas différents
lorsqu'ils imposent leur foi à coups d'épée.
Urbain VIII voyant la conception anthropocentriste de l'univers,
telle que prêchée par l'Église, menacée
par Galilée, n'a pas hésité à le bâillonner,
non par le raisonnement et la connaissance scientifique mais par
la menace; et que dire de la quasi extermination volontaire des
Incas et de leurs croyances par Pizarro, afin qu'un païen,
disait-il, ne se moque jamais d'un chrétien. Le Moyen-Âge
aura été un terreau on ne peut plus fertile à
l'imposition de valeurs culturelles par le biais de l'épée
assistée du goupillon.
Bien avant le sport extrême on a connu la
religion extrême.
On a utilisé des hermaphrodites-vierges-martyrs
à la Jeanne d'Arc pour non seulement,bouter les Anglais
hors de France, mais aussi pour bouter le légitime plaisir
hors de la sexualité.
Même si les mariages de raison (économiques)
étaient encore de mise jusqu'à tout récemment,
il ne faudrait pas oublier qu'une Madame Bovary habitait presque
toujours dans les parages. C'est ainsi que si l'économique
et la propagation des gènes étaient assurés
par le mariage, l'affectif et le plaisir l'étaient tout
autant par la proximité de l'amant ou l'amante.
Il suffit de se pencher sur l'art de vivre de
la noblesse et la bourgeoisie française du XIXème
siècle pour bien le comprendre. Et Victor Hugo l'a éloquemment
illustré.
Heureusement que, dans les sociétés
modernes, l'humain qu'on a tenté de désincarner
à coups de pensée unique, de valeurs uniformisantes
et de sophismes moraux, redevient de plus en plus humain.
De nos jours, compte tenu de la démographie
mondiale; de la perte de vitesse des préceptes religieux;
de la vision que l'humain a de son passage sur terre et de l'au-delà;
la procréation est moins importante et le plaisir occupe
une place quasi prépondérante dans les rapports
sexuels. Il est de moins en moins justifiable de cloisonner les
rapports sexuels aux seules fins de la procréation et de
la solidification des liens affectifs du couple en vue de sauvegarder
le nucleus familial. Celui-ci étant d'ailleurs de plus
en plus élargi.
"L'inaccessible étoile" qu'est
l'AMOUR ne restera qu'un absolu jamais atteignable, pour des êtres
aussi relatifs que sont les humains.
Alors, qu'est-ce qui pousse les homosexuels à
adopter un comportement identifié à la majorité
en matière de vie conjugale, alors que leur finalité
sexuelle est différente des hétérosexuels?
La culture, simplement la culture.
Des traits culturels de possession, de domination,
de sécurité économique, de servilité,
de confort sexuel et émotif, de crainte, du besoin quasi
incoercible de reconnaissance par un autre, viendront pour quelques
générations encore hanter les rapports entre les
personnes ou couples de toutes sortes.
Il serait peut-être temps de s'émanciper
et de se doter de façons de voir et d'agir plus conformes
au besoin individuel inné de l'être humain, soit
de goûter aux plaisirs de la vie au maximum, sans pour autant
porter préjudice à quiconque tout en conservant
une certaine cohésion sociale.
Les homosexuels sont bien placés pour mettre
de côté les tabous imposés par la société
hétérosexuelle. Ils peuvent créer leurs propres
valeurs, leur façon de vivre leurs relations affectives
avec le minimum de contraintes. Et pourquoi pas la polyandrie
et la polygynie?
Car qui peut prétendre être capable
de satisfaire tous les besoins de l'autre tout le temps? À
moins bien sûr que l'autre soit une carpette.
Mais gardons-nous de vouloir faire du mur à
mur. Laissons chacun libre de choisir sa voie de la façon
qui lui convient dans le plus grand respect des différences...
même si parfois ça peut nous paraître agaçant.
Note: pour en
savoir plus, les lecteurs peuvent consulter entre autres les ouvrages
suivants:
Jared Diamond: Pourquoi l'amour est un plaisir; Le troisième
chimpanzé; De l'inégalité parmi les sociétés.
Borys Cyrulnik: Les nourritures affectives.
Yves Gauthier (Québec)
www.chez.com/anima21
Février 2003
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